
Ne me faites pas confiance, jugez sur pièce ! Voici quelques exemples des textes que j'ai déjà écrits ; vous y trouverez un premier aperçu de mon style, de ma sensibilité.
N'hésitez pas à m'écrire si vous en souhaitez davantage ; ou si connaître la fin d'une de ces histoires vous démange.
" Nous arrivons en Slovénie en février, avec les premières neiges. Elles ne sont pas bien méchantes, si fines qu’elles se dissolvent à peine tombées sur la route. Et puis, nous avons des pneus neige ! Le paysage est féérique: la plaine gelée, saupoudrée de flocons fins, l’air suspendu et, au loin, se découpant superbement, une montagne solitaire dont nous avons fait notre objectif. C’est sur notre to-do list : aller skier sur un maximum de montagnes. Nous avons déjà repéré les stations qui s’y trouvent, et parmi elles, la seule qui acceptera le chien. Nous sommes inarrêtables.
Les contreforts de la montagne se rapprochent. Comme soufflées en avant par notre enthousiasme, nous lançons le van le long des premières pentes. Immédiatement, nous comprenons que quelque chose cloche : Claire a beau tenir le volant avec poigne, elle ne contrôle plus rien de la trajectoire. Les roues ont perdu toute adhésion sur le sol. Nous nous sentons perdre de la vitesse. Avec effroi, nous voyons la voiture s’arrêter, pivoter comme au ralenti, puis entamer un demi-tour sur elle-même. Prisonnières de notre cage de métal, nous assistons impuissantes à la rébellion de notre fidèle monture. On met les warnings (à quoi bon ? Tout le monde voit bien qu’on a un souci), on prie pour ne pas heurter la barrière qui borde la roche, ni ne dévaler le précipice de l’autre côté. Nos tentatives de tourner le volant, d’accélérer, de freiner se révèlent toutes vaines.
Et puis, aussi vite que la catastrophe s’était précipitée, le miracle s’opère : d’une seconde à l’autre, le van se repositionne parfaitement sur la route, les roues récupèrent leur adhérence, et nous repartons dans la plaine déneigée. Comme si la voiture avait, d’elle-même, refusé l’obstacle, et fait tranquillement son petit demi-tour pour repartir sur un terrain plus favorable. En nous causant une belle frousse au passage : nous imaginions déjà les 5 constats d’accident à établir avec des slovènes furieux d’être en retard pour leur semaine de ski…"
" À quelques kilomètres de là, ma grand-mère maternelle entretenait, à Faulx, une adorable maison qui deviendra mon deuxième foyer. C’était une grande bâtisse lorraine, rustique, en pierre calcaire, dont une petite partie seulement était consacrée à l’habitation, le reste se partageant entre de gigantesques greniers et grange. Nous nous y rendions presque tous les dimanches. En son cœur battait une imposante cheminée, à la chaleur bienfaisante. Elle possédait aussi une large pierre à eau : mon grand-père, décédé longtemps avant ma naissance, était chaudronnier, et l’on apercevait encore çà et là quelques échos de son art, comme cette élégante poignée de pompe en laiton. Dans la cuisine, j’étais saisie par la cuisinière massive et ses ouvertures concentriques, que ma grand-mère alimentait de bûches de bois clair.
Une chose me revient clairement de cette époque : la joie avec laquelle ma grand-mère célébrait notre arrivée. C’était une femme tendre, maternelle, de bonne composition. Elle s’occupait de son potager elle-même, en y concentrant toutes ses attentions : jusqu’à la fin de sa vie, je l’ai connue bêchant, sarclant, ratissant, semant, récoltant les légumes dont elle garnissait ses assiettes – et les nôtres. L’âge creusait en elle une vilaine arthrose qui ne suffisait pas à brider son tempérament généreux. Elle s’occupait de moi infatigablement, se prêtant à mes jeux, me couvant de son bon sourire depuis son grand fauteuil. Quand ses jambes étaient prises de douleurs, je soufflais dessus pour les atténuer, comme si mon souffle possédait le pouvoir de la guérir.
La maison était à l’image de ma grand-mère : si douce, toujours accueillante. Une vigne vierge couvrait toute la façade. Il fallait la voir à l’automne, brûlant en mille nuances d’orange. Devant l’entrée, de petits parterres de fleurs, bien entretenus. Sur tous les sols, un parquet nourri et ciré. Ma grand-mère était modeste mais très soigneuse. "
" À l’occasion d’un passage chez elle, Hélène avait ramené des raquettes de badminton, et une poignée de volants. Elle avait proposé à tout les colocataires, et, pour des raisons différentes, personne n’était très emballé. C’est un des rares sports que j’appréciais enfant et, si la perspective de jouer avec elle (et, potentiellement, de m’y ridiculiser) m’inquiétait un peu, je pris finalement mon courage à deux mains et acceptai. C’était une soirée de novembre, ou peut-être de décembre. Il pleuvait légèrement, et Hélène et moi jouâmes en pleine rue, sur la route, devant la maison. Un moment de grâce enfantine, de grande liberté ; des discussions légères, rythmées par le mol échange de nos projectiles. Parfois, le volant passait par-dessus la grille et nous devions faire le tour pour le récupérer ; parfois, une voiture passait et il fallait nous rabattre sur le trottoir, interrompre pour un instant le jeu, nous regarder, avant de reprendre notre posture. J’ai fini la soirée trempé, terriblement heureux.
Par la suite, le badminton devint notre rituel. Nous découvrîmes que la cour de la maison s’y prêtait tout aussi bien, et c’est là que, un soir par semaine, ou bien deux, nous nous retrouvions. Une heure, deux heures d’échanges, et puis des discussions pendant des heures encore, jusqu’à ce que minuit nous accuse. Le temps passant, nous avions de plus en plus de mal à nous séparer, et tout était prétexte à relancer la conversation. Certains soirs, la rigueur de la fin d’automne avait engourdi ses petits doigts ; j’avais alors entouré ses mains des miennes, pour, un peu tremblant, les réchauffer.
Il vint un jour où notre petit monde ne nous suffit plus. Hélène fit un pas de côté, et voilà que l’univers s’ouvrit. Pour aller chercher un volant égaré, elle grimpa sur le mur qui bordait notre cour ; un long toit plat s’avançait là sur des garages, qui longeait les maisons voisines et débouchait, dix mètres plus loin, sur un petit parc municipal. C’était un terrain fantastique, parvis de plusieurs mondes. Le cœur battant, je la suivis. Nos discussions s’étirèrent là-haut, dans les buées bleutées de nos souffles. Pour nous réchauffer, nous arrachâmes un jour à des branches qui s’étendaient là une poignée de brindilles, et nous fîmes mine de les fumer ensemble. Nous étions deux enfants, riches des merveilles d’esprits adultes, avec le réel pour terrain de jeu. "